Métro, les corps se croisent, se frôlent, se hument. Rien ne se côtoie, tous se jouxtent. Indifférences feintes ou réelles, soucis, rêveries, visages clos et reclos. Mais là, aussi, viennent l’effleurement, la fuite, la brûlure d’un regard, d’un sourire : tremblement de la peur comme du désir. Quel est le risque ? se perdre au miroir que cet autre me tend ? Transe au flux des images et des mots des affiches plus grandes que nous, des stations dont les noms évoquent des divinités disparues. Expérience extatique du changement à vue des faces, dans laquelle, rivés à nos sièges comme à nos masques absorbés nous tentons de cacher à nos voisins et à nous-même à quel point nous ne nous appartenons plus.

(préface du livre autoédité en 2004)